Le programme au théâtre municipal de La Gaité

 
 

Du samedi 11 décembre 1909 . Source : Gallica


--- A la Gaîté, ce sont les frères Isola qui viennent de donner à Quo Vadis une interprétation hors de pair. C'est réellement superbe, et l'œuvre se prête merveilleusement au raffinement de luxe d'ans lequel on l'en a chassée.
--- Les Isola ont réussi là où tant d'autres avaient échoué : ils ont su, à des prix modestes présenter an public tout un répertoire d'opéras et d'opéras comiques inconnus des jeunes et qui faisaient la joie de nos pères.
--- Les gens chics — lisez : les imbéciles — assurent que c'était de la musiquette, mais ceux — et ils sont nombreux —qui ne voient pas que Wagner — remplissent la salle et se délectent aux mélodies de Meyerbeer, Verdi, Donizetti, Boïeldieu.
--- Le génie de tous ces musiciens, c'est précisément d'avoir su se mettre à. la portée du public. Les Isola ont fait œuvre utile et saine en le comprenant.

 

 

Du samedi 14 janvier1911 . Source : Gallica

QUO VADIS ? au Théâtre Municipal

--- Il faudrait être grincheux et de mauvaise foi, pour ne pas se déclarer satisfait du spectacle auquel nous convia M. Audisio, mardi dernier. Depuis longtemps, en effet, nous n'avions eu telle fête d'art. Quo Vadis, a été monté avec un soin tout particulier, et plus d'une fois, au cours de sa représentation, nous eûmes l'illusion d'être, sinon à la Gaîté, du moins dans un excellent théâtre de province. C'est donc des compliments et des fleurs que je dois distribuer à la direction comme aux artistes qui pleins d'une noble émulation, s'appliquèrent à faire de leurs personnages des créations vivantes et intéressantes.
La musique de M. Nouguès est discutée à Paris ; Debussistes et Vincendindistes..... et les autres avec (et Dieu sait s'il y en a, d'autres !), la nient âprement. Peut-être est-ce le succès qui la rend d'une digestion difficile aux toujours aimables confrères qui n'arrivent pas à se faire jouer. De très nombreuses représentations à Paris et en Province n'ont pas, en effet, épuisé le grand succès qui accueillit l'œuvre à son son début et, aujourd'hui encore, quand la Gaîté veut faire grosse, recette, elle affiche Quo Vadis. Les mêmes bons camarades dont je parlais vous diront que ce n'est pas la musique de Nouguès qui décida du succès, mais bien la luxueuse mise en scène des frères Isola. Pour nous, sans nous attarder à ces méchancetés, hélas ! si fréquentes entre artistes, nous dirons que le premier et le dernier acte nous ont plu infiniment, que nous avons rencontré ailleurs de fort belles choses, gâtées souvent par un peu de pédantisme, mais que, d'une façon générale, la musique reste constamment intéressante. La partie vocale — est ce la faute de notre orchestre qui m'a paru bruyant parfois?... — semble négligée par endroits, surtout au deuxième tableau qui devient une pantomime soulignée de musique.
Naturellement l'œuvre s'embellit de magnifiques illustrations. Ici nous eûmes l’Atrium de la maison, de Pétrone, le Cirque et le Pont sublicius, œuvres de Quignon, qui furent des cadres magnifiques pour lesquels nos artistes composèrent des tableaux tragiques ou charmants.
---- Il nous faudrait énumérer toute la distribution pour être juste et n'oublier personne, car tout le monde fut à la hauteur de sa lâche. Mlle Beaumont, Lygie d’une beauté et d'une voix impressionnantes, Mme L. Frêville, Eunice délicate et précieuse, Mlle Myrtal, Poppée tragique, Mlles Raymond, Sylvestre, Dehosse... et les autres.
--- Côté des hommes: M. Viaud, Pétrone de grande allure, aux costumes fastueux, et qui fut parfait dans son dernier acte, M. Sarpe, Vinicius ardent et beau, au chef calamistré, M.Beckman, surtout, qui donna à Chilon tout le relief souhaitable, M. Gaillard, apôtre inspiré et consolateur, M. Soubeyran, au masque néronien, enfin MM.. Rambaud, Loriaux, Auriol, sans omettre l'utile Ursus et le muet Croton.
--- Le chœur des martyrs, renforcé par là Lyre Algérienne, fut excellemment chanté et produisit une vive sensation.
--- N'oublions pas Eva Mery, qui dansa avec M de Wandeleer en éphèbe couronné, un pas: suggestif et inspiré de ceux de Régina Badet.
Les masses chorales et, figurantes évoluèrent intelligemment.
Bravo, bravo ! ! G.S.M