L'ANNÉE 1937
Retour sur les planches

 
 

   LES MYSTÉRIEUX ENCHANTEURS    L'intransigeant 15 février 1937
                                                                                          Source Gallica   
      Les deux "mystérieux enchanteurs" Vincent et Émile Isola, qui depuis leur arrivée à Paris en 1880 et leur premier avec le public, salle Lancry, en 1882, où ils firent leurs débuts d’illusionnistes, ont dirigé nombreuses scènes parisiennes, sont aujourd’hui d’écrire en train d'écrire leurs mémoires. Ces souvenirs comprendront autant de parties qu'ils ont dirigé de théâtres, c’est-à- dire douze. Que d’artistes, de Little Tich à Frégoli, de Tamagno à Caruso, ils ont connus! Et que d'anecdotes savoureuses, ils vont conter!
      Et Émile Isola qui prêtait son concours à la "Nuit du spectacle", aux Folies-Bergère, avec son numéro d’ombres, nous rappelait qu’il avait fait ce même numéro cinquante ans auparavant jour, sur cette même scène dirigée alors par Mme Allemand et M. Marchand, scène dont il devait devenir directeur avec son frère Vincent, quinze ans plus tard.

        DE L'OPERA-COMIQUE SAINT MARCEL           L'intransigeant 6 avril 1937 
                 LES TOURS DES ISOLA AU FAUBOURG                 Source Gallica     
                                         
        Matinée de famille au cinéma... Ils sont cent, cent cinquante, peut-être deux cents enfants dans la vaste salle du Saint-Marcel. Jeune public vraiment fait pour accepter le merveilleux, un public qui sans retenue frémit, S’émeut, suit ses élans. L’exemple est contagieux pour les parents.
      Les actualités passent vite... très vite... Et puis la rampe s’éclaire pour la grande attraction. Un orchestre réduit se lance dans une sélection de « Faust ».
       Quelle musique, je vous le demande conviendrait mieux à l’introduction d’un numéro de magie que celle de «Faust», où circule sur des thèmes fortuitement évocateurs la silhouette du plus redoutable illusionniste du monde, Méphistophélès, capable en une seconde de transformer la vieillesse décrépite en une fougueuse jeunesse?
Vincent Isola, qui présente le spectacle d’illusionnisme, est également étonnant manipulateur
Annoncés par la populaire partition de Gounod, les frères Isola, sorciers à leur façon, n’ont pas besoin du diables pour retrouver leurs vingt ans et la dextérité de cet âge heureux.
Le diable pourtant, ne semble pas si loin de nous, lorsqu' Émile, aux tempes argentées, cède à l’injonction de son cadet Vincent et disparaît sur place, comme volatilisé. On a beau se dire que l’adresse et l’ingéniosité viennent, ici, au secours de la magie, l’idée du miracle n’est pas pour déplaire.
— Mesdames... Messieurs... C’est Vincent qui parle; il ne fait pas une conférence, pas même une causerie serie.
Il dit tout juste vingt mots pour rappeler ce que; son frère: et lui furent dans la vie parisienne de ces quarante dernières années — des directeurs fortunés, portés par la confiance jusqu’à l'administration d’une scène subventionnée, l’Opéra-Comique. La séance commence... Je vois sortir du coffret magique une Rose-Marie, fraîche et jolie, toute pareille à celle qui, le soir mémorable du retour des frères à la prestidigitation, sur la scène de l'A.B.C., leur avait valu une ovation interminable. ...Le grand silence qui s’est fait cède aux applaudissements. Mais dès qu’on apporte la malle enchantée, chacun retient son souffle. Et c’est ce qui m’a frappé, hier, au Ciné Saint-Marcel : le faubourg observait une attention presque religieuse devant ces deux hommes qui lui avaient dit avant d’essayer de les distraire en l’étonnant : — Vous avez devant vous deux victimes du sort qui ne perdent pas courage parce qu’elles peuvent encore travailler. L’ "enchaîné diabolique" que viennent voir de près, sur la scène, six étudiants soulève d’admiration ce public tout d’instinct.        Pour terminer, Émile, de ses dix doigts, projette sur un écran la plus surprenante, la plus exacte série d’ombres d’animaux et de types. A ce moment seulement, des exclamations échappent aux spectateurs
Émile Isola dans le numéro de " l'Homme enchaîné ", que le public est admis à voir de près.
      Dans leur loge, après la séance, je félicite les Isola. Vincent m’annonce qu’ils vont paraître au Ciné Orléans, au Ciné Lyon, etc.
Émile dit :
— Je dois écourter mon numéro d'ombres. J’ai supprimé Maurice Chevalier, Zambelli, trente autres...
      Faire naître de ses dix doigts tant de personnages leurs traits essentiels. Peut-on nier, en voyant ces merveilles d’observation d’Émile, qui fut pour Vincent, le plus précieux des co-directeurs de théâtre ? — E. B.


OÙ LES FRÈRES ISOLA RECRUTENT DES
COLLABORATEUR IMPRÉVUS ET BRILLANTS
           Paris-soir le 14 avril 1937                                                    
Source Gallica
           Les Frères Isola présentaient hier soir à l'Empire devant la presse leur numéro d'illusionnisme. Une assistance de choix où l'on remarquait Mistinguett, Cécile Sorel, Meg Lemonnier, Danielle Darrieux et Henri Decoin, Lisette Lanvin, Mona Goya, Fernand Fabre, Polaire, Paul Reboux, Pizani, Paul Derval, André de Fouquières, Jacques Marsillac, rédacteur en chef d'un grand journal du matin, suivait avec joie les expériences des anciens directeurs de Mogador.
          A un moment donné, Vincent Isola demanda dans la salle quatre spectateurs de bonne volonté. On vit hésiter Cécile Sorèl, Mistinguett mais André de Fouquières, Jacques Marsillac, deux autres spectateurs les devancèrent. On installa Jacques Marsillac après lui avoir bandé les yeux sur une chaise près d'Émile Isola soigneusement ligoté. Le temps de les cacher quinze secondes au public, Jacques Marsillac n'avait plus son veston et Émile Isola toujours aussi bien ligoté l'avait sur les épaules.
          Ces collaborateurs imprévus s'étaient montrés particulièrement brillants.
                                                                                                                    Roger SARDOU.

             LES ISOLA À L’EMPIRE
       Marianne le 21 avril 1937                                                                                                       Source Gallica
 
      « Ils sont étonnants, ces frères-là », disait un spectateur à la sortie de l'Empire.
      Et c'est vrai. Leur numéro est au point, sans longueurs, sans bavures. On ne peut admettre qui il y ait eu dans leur carrière le moindre entr'acte, et il faut imaginer que, lorsqu'ils présidaient aux destinées (c'est bien l'expression d'usage, n'est-ce pas ?) de l'Opéra-Comique et du Mogador, ils donnaient parfois à leurs amis le spectacle de leurs tours.
          M. Vincent Isola est le speaker de l'équipe. Il parle, il explique le coup — un peu trop, peut-être — car il rappelle sans se lasser qu'il a été un « directeur », que Rose-Marie fut joué mille cinq cents fois à Paris, etc.
        M. Émile Isola se tait. Pas un mot ne sort de sa bouche au cours de la brève séance, mais, en revanche, il gesticule, fait mille grâces, un peu comme la petite fille en maillot rose qui jette le mouchoir au trapéziste. Enfin, c'est lui la victime qu'on lie et délie sous le rideau magique ; c'est lui toujours qui enlève au spectateur bénévole son veston ou son gilet.
L'autre soir, les spectateurs bénévoles furent MM. André de Fouquières et de Marcillac. Comme beaucoup de nos confrères se trouvaient dans la salle, vous pensez bien que le rédacteur en chef du Journal eut son petit succès.
         MM. Vincent et Émile Isola ont été très applaudis. M. Émile en était enchanté. Il remerciait, souriait derrière ses binocles, saluait sans cesse, ravi de retrouver un peu de sa jeunesse et de n'avoir pas à monter quelque opérette à trop grand spectacle pour la saison.
          M. Émile est un sage
.                                                                                                    F. B



     LE THÉÂTRE ISOLA OUVRE SES PORTES
      Paris-Soir  le 23 octobre 1937                                             Source Gallica

          C'est ce soir qu'un charmant événement parisien se produit : les Frères Isola redeviennent directeurs de théâtre - pas d'un grand théâtre, bien sûr - mais d'une petite salle : la Potinière, où ils reprendront le métier de leur jeunesse, celui qui leur valut la fortune et la direction de grands théâtres : la magie.
— Ce sont nos amis qui ont repris ce théâtre pour nous, me dit Vincent Isola. Nous leur sommes profondément reconnaissants.
— Notre spectacle est un spectacle entier d'illusions et de « trucs » dont la plupart sont nouveaux ou modernisés.
          Et les Frères Isola nous parlent de leurs « tours » avec une joie, une jeunesse étonnante. On ne peut s'empêcher d'admirer ces deux hommes qui, après avoir dirigé treize grands théâtres, ont repris courageusement leur numéro puis - le succès les aidant - un tout petit théâtre, ces deux hommes à qui nous disions : « Vous avez l'affection et le respect de tous » et qui nous répondaient : « C'est tout ce qui nous reste, mais c'est l'essentiel. »
                                                                                                                     Roger Sardou.


          LES FRÈRES ISOLA ONT  Paris-Soir  le 24 octobre 1937
 OUVERT   LEUR THÉÂTRE HIER SOIR  Source Gallica
           Les Frères Isola
sont redevenus hier soir directeurs de théâtre. Tous leurs amis fidèles avaient tenu à assister à cet événement parisien, à ce joli événement. On retrouvait au contrôle les dévoués collaborateurs des Frères Isola du Théâtre Mogador et du Théâtre Sarah-Bernhardt.
               Cela faisait plaisir. Et quand, pendant la première partie du programme l'on vit au fond du théâtre Vincent Isola venir jeter un coup d'œil sur la salle — un coup d'oeil de directeur un peu ému,cela fit plus plaisir encore. Dans la salle, on remarquait M.Robert Trébor, M. Paul Abram, qui cachait dans son veston des jeux de cartes entiers... mais Émile Isola veillait ; Oléo, qui poussait des cris d'horreur et d'étonnement pendant les expériences de lévitation ; Nina Myral, Tonia Navar, Lucien Rozenberg , etc ...etc ...


 

CHEZ LES FRÈRES ISOLA      Paris-Soir  le 3 novembntre 1937
TROIS HEURES D'ILLUSION           Source Gallica

     Il y eut jadis, sous le second Empire, le théâtre Comte, passage Choiseul. Il y eut ensuite, dans le musée Grévin, le théâtre Robert-Houdin. Ces deux théâtres, dirigés par des illusionnistes célèbres, connurent longtemps la prospérité et la vogue. Je ne vois pas pourquoi les frères Isola qui avant la guerre, attirèrent déjà tout Paris à la salle des Capucines, ne réussiraient point sur la scène qu'ils inaugurent aujourd'hui et qui n'est autre que celle de l'ancienne Potinière.
         Leur premier spectacle est fort divertissant. Les deux frères sont sympathiques. Ils s'entendent aussi dans l'art de composer un programme.
       Pour nous plonger tout de suite dans une atmosphère de magie, ils nous font entendre d'abord un orchestre hongrois. La, Hongrie, avec ses montagnes et ses forêts mystérieuses, est la patrie élue des sorciers. M. Toubas tire de son violon des sons à coup sûr diaboliques. M. Mendi fait tour à tour rire et gémir l'enfer tout entier en chatouillant et en pinçant les cordes de son cymbalum enchanté.
        Mais voici les Isola en personne. Ils renouvellent leurs prodiges déjà applaudis tant de fois. Une belle fille, blonde et rose, se prête à leurs expériences. Ils la font disparaître et réapparaître à leur gré. Avec beaucoup d'esprit parisien, Vincent commande aux esprits infernaux. Émile s'offre à toutes les épreuves et les surmonte. Tel le fameux Guzman, il ne connaît pas d'obstacles. Il délivre son corps chargé de cordes et de chaînes. Il fait naître d'une feuille de papier rapidement déchirée des fleurs merveilleuses.
         Mais le moment le plus émouvant du spectacle est celui qui est consacré à la transmission de la pensée. La jolie princesse Dinarzarde, le visage voilé, se place de profil devant un piano. Vincent Isola vient dans la salle. A l'oreille, vous lui murmurez le titre d'un opéra, d'un opéra-comique, d'une opérette, oubliés ou connus. Un geste du magicien et la princesse exécute sur son piano l'air demandé.
       Ensuite, c'est le nom d'une artiste célèbre que vous confiez tout bas à Vincent Isola. Et la princesse, que je crois bien avoir aperçue naguère sur nos spirituels tréteaux montmartrois, imite délicieusement la vedette choisie : Arletty, Suzanne Dehelly, Marguerite Deval, Gaby Morlay... Le pacte avec Satan me paraît hors de doute.                                        P. V.