Source: gallica        
dimanche
1er mai 1938
       
                           
 

THEATRE ISOLA : Une demoiselle fardée, comédie en 3 actes de M. Albert Acremant..

---- M.M. Emile et Vincent Isola, après avoir longtemps été des grands directeurs de music-hall, ont, durant plusieurs années, présider aux destinées du Théâtre de la Gaîté dont ils firent la Gaité-Lyrique qui connut des heures glorieuses. Ils furent à deux reprises, co-directeurs de l'Opéra-Comique. Ils exploitèrent simultanément le Théâtre Sarah-Bernhardt, où rien que la fastueuse reprise de la Princesse Lointaine, leur avait valu la reconnaissance du monde des lettres, et le Théâtre Mogador. A Mogador, ils connurent d'éclatants succès; mais ces succès ne « payent » qu'à condition de faire durant de très longs mois le maximum. La moindre défaillance suffit pour ruiner ces entreprises de grands spectacles où sont engagés de formidables capitaux.
---- Malgré leur habileté et leur courage devant des tâches de plus en plus difficiles, les frères Isola furent contraints d'abandonner la lutte et de passer la main. On les retrouve aujourd'hui, à la tête du petit théâtre qui porta le nom de Théâtre de la Potinière.
---- M.M. Emile et Vincent Isola n'avaient pas oublié la fructueuse carrière de Ces Dames aux chapeaux verts, la pièce de M. Albert Acremant qu'ils avaient montée au Théâtre Sarah-Bernhardt. Ils demandèrent au même auteur: Une demoiselle fardée. C'est une étude de mœurs provinciales où l'on voit deux jeunes filles qui, comme toutes les jeunes filles, rêvent d'un fiancé.
---- Hortense et Clotilde sont donc à la recherche du prince charmant, en l'espèce le fils d'un notaire qui n'est ni prince ni charmant ; mais en matière matrimoniale il ne faut pas être trop exigeant. Les deux jeunes filles s'attribuent chacune le fiancé qui ne s’est pas prononcé tout d'abord. Il porte son choix sur la cadette. L’aînée, par dépit, se fait enlever par un électricien qui l'emmène à Paris. Après un court séjour dans la capitale, Hortense reparaît dans la petite ville qui l'a vue naître. Elle a dépouillé son ancienne personnalité pour adopter celle de la « demoiselle fardée ». Son maquillage et ses allures font scandale ; mais ce scandale lui vaut une foule d'adorateurs plus ou moins frénétiques. Le fils du notaire lui-même, le fiance de sa sœur Clotilde, voudrait l’épouser Tout finit par s'arranger, assez mal d'ailleurs. Hortense et Clotilde reprennent leur place sous le chaperon maternel en attendant une nouvelle aventure.
---- Melle Madeleine Lambert personnifie Hortense ; MIle Renée Bartout Clotilde ; Mme Alice Bonheur est la mère des deux jeunes filles ; Mme Marcelle Barry potine et médit avec une ardeur toute provincial. M. Laurenson est un excellent notaire. IL y a aussi M.M. Georges Grey et Jean Claude.

   
 
   
     

Au théâtre Isola:

"La demoiselle fardée"

comédie en 3 actes d'Albert Acremant

 
Source: Gallica  
Samedi 21 mai 1938  
     
 
     
   

 

AU THÉÂTRE ISOLA: « Une demoiselle fardée »


---- Les frères Isola, infaillibles experts en choses théâtrales, viennent de nous offrir une excellente comédie.
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Pascal disait : et c’est le nain Delphin qui, de manière funèbre, nous a rappelé cette maxime que « tout le malheur des hommes vient de ce qu'ils ne savent pas rester dans leur chambre ».
---- Tout le malheur des femmes vient peut-être de ce qu’elles ne savent pas rester dans leur famille.
Telle est, du moins la morale que l’on peut tirer de cette « Demoiselle fardée » d'Albert Acremant. Mais je crois que, cette morale-là, il n'y croit pas beaucoup lui-même. Sa conclusion est très « famille » parce qu'il ne faut pas scandaliser le public. Mais la peinture qu'il a faite de ce milieu provincial est si satirique et, par bien des traits, si juste, que l'on est autorisé à concevoir des doutes sur la morale pot-au-feu de ce spirituel écrivain.
           La photo d'Albert Acremant m'a été gentiment transmise par Gilles Acremant   petit fils d'Albert.

---- Il nous a montré une famille provinciale composée d’une mère et de deux filles. L'ainée se laisse séduire. Un homme l’emmène à Paris, à la grande jalousie de la cadette, qui aurait bien voulu, elle aussi profiter cette chance, bien qu’il s’agisse d’une aventure extraconjugale.
Quand l'aînée revient dans la petite ville, elle est magnifiquement vêtue, élégante, prestigieuse, fardée. Mais cette prospérité n'est qu'extérieure. Alors que tous les hommes de la petite ville tombent amoureux de la transfigurée, elle confesse à sa sœur que Paris l'a bien déçue. Et cette conclusion arrive juste à temps, car la sœur, à son tour, allait suivre la même voie périlleuse.
---- Le public a fait un Juste succès à cette peinture de mœurs qui est de la veine des « Dames aux chapeaux verts », et qui a été jouée délicieusement. Madeleine Lambert a su être tantôt spirituelle, tantôt émouvante au point de tirer les larmes. Elle fut assistée par la vivante Renée Bartout ; par Marcelle Barry, en vieille demoiselle aigrie et médisante ; et par Georges Grey, assez beau garçon pour justifier la confiance qu’il inspire à des innocentes

Paul REBOUX

     
                     
   
      Source: Gallica        
       
mercredi 21 septembre 1938
   
                           

LA QUINZAINE THÉATRALE A PARIS
Une demoiselle fardée au théâtre Isola


---- Le théâtre des frères Isola, décidément ne chôme pas. Nos compatriotes qui nous avaient prouvé qu'ils étaient loin d'être « rouillés » en exécutant devant nous leurs tours de prestidigitation, ont décidé, de crainte que l'on se lasse de leur numéro — ce dont nous ne saurions complètement les apprcuver -, de céder leur scène à la comédie d'Albert Acremant : Une demoiselle fardée. - Cette pièce est le complément de Ces dames aux chapeaux verts. Albert Acremant fut l'adaptateur théâtral de ce roman écrit par sa femme. L'œuvre porte aujourd'hui sa seule signature.
---- Ce qui plaît dans cet ouvrage, comme dans le précédent, c'est la peinture du milieu où se déroule l'action, le portrait réaliste des différents personnages et l'évocation rigoureusement fidèle des mœurs provinciales.
---- Transportés, au lever du rideau, à une centaine de kilomètres de Paris, nous prenons part aux aventures amoureuses de deux sœurs, Hortense et Clotilde, en quête d'un mari. C'est leur mère restée veuve, Mme Gardranot, qui s'occupera de leur avenir. Elle réussit à moitié dans cette tâche, puisque son voisin, le notaire Fig, lui déclare que son fils est devenu amoureux de l'une de ses filles. Mme Gardranot annonce aussitôt la bonne nouvelle à ses enfants, mais comme le notaire a omis de lui dire le nom de l'élue, Hortense, qui a coiffé sainte Catherine, s'adjuge cette demande en mariage.
---- Vous imaginez la surprise et aussi la déconvenue de la pauvre fille quand le fils du notaire déclare que c'est Clotilde qu'il aime. Hortense bouleversée perd la tête et fait une fugue à Paris. L'électricien avec qui elle est partie est un souteneur, mais elle l'ignorait. Elle ne tarde guère d'ailleurs à apprendre la vérité car son compagnon, dénué d'argent, la contraint à ses prostituer.
---- Après plusieurs mois d'absence, elle revint au bercail. « Demoiselle fardée », elle est devenue la plus désirable des femmes et les jeunes gens conquis la bombardent d'épîtres amoureuses. Hortense est aussi devenue inabordable, puisque dégoûtée des hommes et de l'amour. Elle a compris que seule l'affection des siens compte. Dans son expérience nouvelle, elle puise les arguments nécessaires pour retenir au foyer sa sœur Clotilde qui allait partir à son tour avec le même séducteur.
---- A la fois drame et comédie, tant par le sujet que par la forme, cette pièce plaît infiniment. C'est d'une légèreté de touche, d'une fraîcheur et d'une ironie souvent délicieuses.
L'interprétation est excellente. Madeleine Lambert indique à merveille les deux états d'âme d'Hortense : la jeune fille « oie blanche » et la femme tombée au dernier échelon de l'échelle sociale qu'un brusque coup de barre parvient à sauver. Renée Bartout joue Clotilde avec une charmante vivacité.
---- Lucien Laurenson est un notaire qui cache, sous les dehors d'un puritanisme onctueux, un tempérament morbide. Marcelle Barry qui, elle aussi, mérite d'être citée, campe avec pittoresque une vieille fille médisante et bavarde. Elle colporte d'une maison à l'autre les ragots, les médisances, les calomnies glanées un peu partout et aggravées par son imagination. C'est bien la pire des mégères dépeinte par une plume aiguisée et malicieuse ! Les rôles de Mme Gardranot et du fils du notaire sont respectivement interprétés par Allice Bonheur et Jean-Claude.
Georges Grey, le « poulain » de Sacha Guitry, est le jeune électricien.
------------------------------------------------------------------------------------------------Henri FARAUT