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L'autre jour, Madame Pauline Carton chez Sacha
Guitry, était toute timide et sage, en train de se colleter
avec des accessoires surprenants. Elle s'essayait à la prestidigitation
et j'en sus bientôt les raisons.Qui ne connaît
les frères Isola ? Les directeurs de théâtre
? Oui, de Mogador cette année encore, mais ce sont eux qui ont
créé le music-hall en France.
Ils ont eu successivement les Capucines,
Parisiana, l'Olympia,
les Folies-Bergère, la Gaîté-Lyrique,
l'Opéra-Comique, Sarah-Bernhardt
et Mogador. Ils ont engagé
dans leur vie plus de neuf cents artistes,
ils en ont découvert d'innombrables. Ils ont donné à
l'Assistance trente-six millions.
Ils
avaient fait des tours merveilleux, il y a quarante ans aux Capucines,
et on leur en a fait de beaucoup moins drôles. Ce sont des artistes
comme au premier jour et il ne leur reste que des souvenirs de leur existence
brillante et méticuleuse. Chaque soir les vit en habit, l'œil
à tout, sauf à leur bourse. Il ne leur reste rien, absolument
rien que leurs tours de jadis qu'ils vont mettre au goût et au rythme
du jour. Si ! Il leur restait un ami. Un homme
qui passe, sur la scène, pour un égoïste parce qu'il
est gracieusement dépourvu d'hypocrisie, mais qui est le cœur
le plus généreux que l'on connaisse, je ne dis pas : à
la ville, puisqu'il s'agit encore ici du théâtre. Et après
tant de représentations au bénéfice de ses camarades
malheureux, c'est en faveur; d'Émile et de Vincent
Isola qu'il a mobilisé les vedettes les plus aimées
du public. Liées entre elles, et pour un soir (après minuit)
par un scénario de Sacha Guitry, devant l'A.B.C
le plus élégant. Pauline
Carton y joua un sketch avec Michel Simon et
c'est pourquoi, avant-hier, je la voyais répétant avec ce
souci qu'elle met à tout, surtout quand il s'agit de faire rire,
chez l'illusionniste le plus étonnant que nous avons, qui jongle
avec des mots, avec son esprit, avec son cœur, mais jamais avec le
cœur des autres.
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