Mme Cécile Sorel doit débuter le 15 septembre
place du Châtelet, soit dans Sapho, soit dans
Anna Karénine. Les frères Isola
sont de passage à Paris. Pour nous entretenir avec eux, entre
deux randonnées en automobile, nous aillons faire appel à
une vieille et fidèle amitié. La porte de leur bureau
directorial du Théâtre Sarah-Bernhardt s'ouvre
donc devant l'ami. Emile et
Vincent sont assis l'un en face de l'autre ; nous prenons
place sur un siège entre les deux directeurs. Sur le bureau,
un monceau de correspondance, et au mur une superbe et longue maquette
de l'affiche des Variétés qui porte la brillante
distribution, de la revue de Rip. Empressons-nous de la copier,
chaque interprète ayant la place qui lui est assignée.
Nous notons Dorville, Marguerite Moreno,
Pauley, Arletty, Edmond Roze
et Gabaroche puis Huguette Grégory,
Carlos Conté, Renée
Varville, Suzy Leroy, Paul Dullac,
Duard fils, les Blue Kellly Girls
(remarquées au bal des Petits Lits Blancs), Dany Loris,
Rhéan et, en vedette américaine, Loulou
Hégoburu.
En contemplant l'affiche
de cette revue que les frères Isola vont présenter avec
M. Max Maurey, nous nous rendons compte
du surcroît de travail qu'un tel spectacle va occasionner aux
deux directeurs qui, parallèlement, doivent présider aux
destinées du Théâtre Sarah-Bernhardt et
du Théâtre Mogador,
C'est ce surcroît de travail qui a poussé les frères
Isola à prendre une grande décision en
ce qui concerne la scène de la placée du Châtelet.
-
La saison prochaine, nous déclare Émile Isola,
nous aurons comme collaborateur, et directeur artistique du Théâtre
Sarah-Bernhardt, M. Lucien Rozenberg.
— Ce choix est excellent.
— D'autant plus, ajoute Vincent Isola, que nous
avons toujours reconnu en M. Lucien Rozenberg
un comédien du Boulevard et un artiste éminemment classique.
A nos côtés, place du Châtelet, nous aurons donc
Lucien Rozenberg comme directeur artistique, notre cher Perronnet
sera toujours l'administrateur général, et notre fidèle
Henry Klotz, conservera ses fonctions de secrétaire
général.
— Et vos projets?
Une rentrée de Cécile Sorel
Émile Isola prend la parole.
—
La réouverture s'effectuera le 15 septembre avec une série
de représentations de Mme Cécile Sorel.
Nous estimons que la grande artiste trouvera au Théâtre
Sarah-Bernhardt le cadre qui lui convient le mieux, et dans
cette salle elle pourra déployer ses admirables qualités
dramatiques.
— Dans -quelle pièce fera-t-elle ses débuts?
— Il est question de Sapho ou d'Anna Karénine.
Après cette série de représentations, Mme Cécile
Sorel entreprendra la tournée que vous avez annoncée,
et nous espérons bien que dans là suite elle reviendra
jouer chez nous. -
M. Vincent
Isola nous parle ensuite de leur nouveau collaborateur M. Lucien
Rozenberg.
- Nous sommes ravis, nous dit-il, de travailler avec ce vieil ami, dont,
depuis longtemps, nous avons apprécié les efforts. C'est
un comédien très précieux pour des directeurs,
et nous sommes heureux de vous annoncer qu'après les représentations
de Mme Cécile Sorel, il créera place
du Châtelet une œuvre inédite avec Mme Madeleine
Soria, et cette grande artiste, douée d'une
si frémissante sensibilité, restera comme à l'Athénée
la fidèle collaboratrice de son mari.
On frappe à
la porte. C'est le chauffeur; qui vient annoncer que la voiture est
prête. N'abusons pas des moments des deux directeurs de passage
dans la capitale. Timidement, nous glissons :
— Et Mogador?
—
A Mogador, déclare Émile Isola, il n'y aura pas
de clôture annuelle.Nous voulions arrêter l'Auberge
du Cheval-Blanc, les recettes nous en empêchent. Le 7 septembre,
on reprendra La Vie parisienne avec Oudart,
Dréan, Laverne, Saint-Bonnet,
Danièle Brégys, Rose
Carday, Hélène Regelly, puis
ce sera la création de Mandrin, livret de Rivoire
et M. Romain Coolus, musique
de Szule avec Fanny Heldy, le ténor
Jouatte et Marcel Carpentier.
Nous entendons
le moteur de la voiture des frères Isola qui
tourne au ralenti avenue Victoria.
Souhaitons bonnes vacances et surtout du repos à ces deux grands
artisans du spectacle, qui servent si merveilleusement l'art dramatique.
J. DELINI