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Les lauriers du docteur
Doyen empêchent-ils M. Briand
(ministre de l'Instruction publique)
, de dormir?
Le docteur
Doyen, nul n'en ignore, réussit jadis la difficile opération
qui consistait à séparer les deux sœurs siamoises,
Doodica et Radica. M. Briand s’efforce de séparer les deux
frères siamois que les frères Isola.
Les deux Isola, chacun sait ça,
ont toujours dirigé en commun les salles de spectacle dont ils
furent les administrateurs : Salle des Capucines, Olympia,
Folies-Bergère, Parisiana, la Gaîté.
Toujours
ensemble, ils avaient un seul bureau directorial pour eux deux ; quand
ils donnaient un ordre, l'un commençait à parler et l’autre
achevait. Quand l'un d’eux avait une idée, l’autre
l’émettait ; et si d’aventure, Isola l’aîné
partait en voyage, Isola le jeune le suivait
derechef. Les deux Isola, donc, postulaient pour la direction
de l’Opéra ; ils demandaient ce poste pour eux deux,
ne pouvant se faire à l’idée de se séparer.
Or, voici que M.
Briand prenant un scalpel, veut
séparer les Isola ; coupant et taillant leurs chairs, il veut expédier
l’aîné à l’Opéra-Comique
et le cadet à la Gaîté
les deux frères s’insurgent ; ils protestent. Véhémentement,
ils disent qu'ils ne veulent pas être ainsi séparés.
Siamois ils sont, siamois ils veulent demeurer. C’est bien leur
droit, après tout. Voyez-vous qu'un ministre s’avise de séparer
les frères Rosny (frères écrivant
aves un seul nom) , et d’envoyer l’un d’eux chez Ollendorff
(maison d'édition)
et l’autre chez Fasquelle (maison
d'édition) ? Il n’y réussirait pas.
M. Briand aura fort à faire
s’il veut mener son entreprise à bien. Si toutefois il y
parvient, on pourra dire de lui, plus tard : «
C’est le ministre fameux qui isola les Isola ! »
Le Huren.
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