Source Gallica
 
Comoedia  du mardi 5 mai 1936
 

         Les beaux décors de Mogador sont vendus samedi.
                "Le samedi 9 mai, dans l'atelier des décors du Théâtre Mogador, vente aux enchères publiques de décors, praticables et cartonnages, après liquidation judiciaire de la Société Théâtrale des Frères Isola."
            Dans sa brièveté, cette information n'est-elle pas impressionnante!
               Les frères Isola, qui furent les rois de Paris, les frères Isola qui, triomphèrent sur toutes les grandes scènes de la capitale, vont voir disperser au gré des enchères publiques tout ce matériel qui avait ébloui Paris, la province et même l'étranger, tout comme s'il s'agissait du plus inexpérimenté des directeurs ! C'est un signe des temps, mais comment ne pas éprouver de sympathie attristée.


 

            A voir l'énumération des pièces dont les décors vont être  dispersés — pièces deux fois millénaires — Nono Nanette, Rose-Marie, L'Auberge du Cheval-Blanc, qui réalisèrent d'impressionnantes-recettes, on n'est pas sans penser que succès n'est souvent qu'un météore, et que la fortune d'un directeur de théâtre est chose bien éphémère. A côté de ces éclatantes réussites, les noms de quelques autres opérettes et pièces à spectacle ; Alleluiah, Le Chant du Désert, Tigre et Coquelicot, le Masque de fer rappellent les jours les plus sombres du Théâtre Mogador, ceux qui amenèrent la catastrophe finale.
             C'est une page qui s'ajoute à cette Vie Parisienne que les frères Isola avaient présentée avec tant de faste et ces décors qui répétèrent tant de soirs l'écho des flonflons entraînants d'Offenbach retentiront lugubrement dans quelques jours du bruit sourd du marteau de Me Roger Walther, scandant une dernière enchère. Sic transit ...
                                                                                      Francis Rouget