gallica.bnf -------------: « La RAMPE» 15 avri1 au 1er mai 1931
   
 

~LA VIE PARISIENNE, à MOGADOR présentée par les Frères Isola~

--- Quelle magnifique soirée à la gloire de l'opérette française, après celle, non moins magnifique, du Théâtre Marigny, où Moineau a remporté un si triomphal succès, dont on vous parle plus loin.
--- Je ne sais pas si Max Dearly, notre national fantaisiste, est le seul qui ait fait rire le « Schah » jadis, mais ce qui est certain, c'est qu'il a fait rire; tout le monde entier et que, pour la grande joie du public, il continue. Il fera courir tout Paris, la Province el l'Etranger dans cette fastueuse reprise de La Vie Parisienne, ce chef-d’œuvre des chefs-d’œuvre de Jacques Offenbach.

--- Quelle soirée inoubliable ! Quel délire ! Quels applaudissements ! Quels rappels ! J'en ai encore les oreilles pleines !
MM. Isola, celle fois, oui satisfait tout le monde en nous permettant de réentendre cette éblouissante partition, aux rythmes si variés, si personnels s't la marque du célèbre compositeur, qu'elle semble écrite d'hier... el non d'avant-hier.

--- On ne raconte plus La Vie Parisienne telle que l'ont vue Meilhac et Halévy, sous l'Empire ! On rappelle sa création, ses reprises... pour les jeunes générations qui préfèrent le Sport au Théâtre, alors que l'un et l'autre sont la vie physique et intellectuelle indispensables à la vie toute courte.
--- C'est au Palais-Royal en 1886, le 3o octobre exactement, qur fut créée cette œuvre pleine d'esprit et à la musicalité si précieuse. C'est Zulma Bouffar qui fut alors Gabrielle, la gantière et Hyacinthe, au nez légendaire, le baron de Gondremarck, que vient de ressusciter avec une maîtrise éclatante notre Max-Dearly, formidable verité caricaturale, si j'ose joindre ces deux, en sa faveur, qui paraitraient, pour les autres, invraisemblables.

--- La Vie Parisienne passa an répertoire du Théâtre des Variétés en 1873, où elle fut reprise plusieurs fois, notamment par Jeanne Granier, Méaly, Dupuis, Lavallière, Albert Brasseur, Guy, Max Dearly, Germaine Gallois, je cite les principaux et un peu au hasard, mais il y eu a bien d'autres.


programme
--- La distribution réalisée par les Frères Isola au Théâtre Mogador est, comme ensemble, une des plus remarquables avec MM. Max Dearly, Félix Oudart, Urban, Dréan, Henry Laverne, Gustave Nelson et Mmes Jane Marnac, Danielle Brégis, Jeanne Saint-Bonnet et Rose Carday.
--- Passons-les en revue, si vous le voulez bien. Ils le méritent. Mais tout d'abord, disons que la mise en scène imaginée par le Baron de Gondremarck, Max Dearly, est une merveille d'esprit, de mouvements justes et si vivante qu'elle ressuscite, pour nous, avec un brio extraordinaire, cette époque facile et aimable du second Empire. C'est une véritable reconstitution historique d'une blague formidable dont le baron de Gondremarck est la victime comique. Et quel comique ahurissant, quand il est rendu par un Max Dearly. On a fêté, acclamé Max Dearly qui nous a procuré ce plaisir de qualité si rare aujourd'hui. Félix Oudart, dans ses multiples incarnations, est la joie même. Cet artiste s'extériorise sans tomber dans la charge lourde. C'est un véritable interprète d'opérette, gai, chantant bien et toujours en scène. Nous pouvons féliciter également et pour les mêmes qualités MM. Dréan, Urban, Henry Laverne et Gustave Nelson.
Mlle Jane Marnac est exquise ; comédienne et chanteuse parfaite, fine, jolie et si femme ! Elle a, avec Daniele Brégis, Jeanne Saint-Bonnet, si aimante, et Rose Corday, porté l'interprétation féminine de la Vie Parisienne, à Mogador, à la hauteur de l’interprétation masculine, ce qui n'est pas un mince éloge, croyez-le.
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--- Les danses, de l'époque, réglées par M. Robert Quinault, le furent avec une maîtrise à laquelle ce roi de la danse nous a accoutumés. M. Diot nous a prouvé qu'il savait aussi bien diriger la musique de nos opérettes françaises que les opérettes américaines. Il a enlevé l'ouverture avec un extraordinaire brio et conduit toute la partition comme Offenbach le faisait lui-même, avec une science de l'orchestre incomparable. Les costumes signés par Mlle Jeuny Carré ont été goûtés à l'égal des artistes. Les décors sont à l'unisson de ce grand succès qui a tourné en triomphe pour cette Vie Parisienne, qui est un modèle du genre... du genre que nous aimons, que nous défendons : l'opérette française ! Remercions les Frères Isola de nous avoir prouvé sa jeunesse toujours éclatante !

 
 
 
--------------------------gallica.bnf -------- --------------: « LYRICA» mensuel d'avril 1931
~ A Mogador:
La Vie Parisienne, d'Offenbach ~

 
--- J'écris, aujourd'hui même, dans « Ma Chronique », ce que je pense de la musique de La Vie Parisienne et du succès triomphal obtenu par la reprise qu'en viennent de donner les frères Isola. Il ne me reste plus qu'à parler de la représentation de la pièce et de son interprétation. -
--- Mais comment pourrai-je le faire d'une façon équitable ? Cette diablesse de musique a une telle effervescence, une telle verve, un tel esprit qu'elle colorerait une interprétation blafarde; ce n'est certes pas le cas à Mogador où tous les artistes, sans exception, sont de tout premier ordre; mais voilà : malgré tout le talent de Max Dearly, de Jane Marnac, de Félix Oudart, d'Urban, d'H. Laverne, de Danielle Brégis, de Saint- Bonnet, de Rose Carday et de Dréan, j'ai l'impression qu'ils sont dominés par la musique, c'est-à-dire un peu rapetisses par elle, comme pâlis par son éclat, et je me figure que les créateurs avaient, non pas plus de talent, mais une autre variété de talent, un comique plus large, une interprétation plus en dehors. Il y a un romantisme dans la gaîté, comme dans l'élégie, et il y a un style qui sépare le vrai comique de la plate idiotie de café-concert. Voyez côte côte : Chevallier et Chariot, mesurez !... Vous sentez toute la différence; et bien, c'est cela qui me semblait manquer à l'interprétation actuelle, un peu guindée même dans le déchaînement.
--- Après tout, je me trompe peut-être, mais, en tous cas, je le répète, tous les artistes furent acclamés et à juste titre. Les décors très réussis et une mise en scène somptueuse formaient un cadre magnifique à une figuration importante, à un ballet bien réglé et un cadre de chœurs formé de jeunes voix et de jolies formes; les costumes de Mlle Jenny Carré ajoutaient le chatoiement de leurs couleurs et de leurs soies aux rayonnements des puissants réflecteurs, et l'orchestre, énergiquement entraîné par M. Piot, fut le piment de cette extraordinaire représentation dont le formidable troisième acte déchaîna dans l'auditoire un enthousiasme indescriptible.
--- Une fois de plus, les Isola ont mis dans le mille... représentations. Mais comment font-ils ?
--- Le Secret des Isola ! un beau titre de film !