Texte écrit par Henri Béraud pour le Merle Blanc, hebdomadaire satirique, qui "siffle et persiffle le samedi".
 

 

 

              En deux tomes le Roman d'un Clown. Avant de s'enrichir dans les coulisses de la rue Favart, ils portaient sur le plateau de la rue Bergère la collerette, le minuscule gibus et le nez lumineux des clowns musicaux. 
               En somme, ils commencèrent par produire de la musique au moyen de petits ronds de métal et finirent par produire de petits ronds de métal au moyen de la musique. La fortune et les hommes ne leur ont point fait oublier les succès de leur jeunesse. Ils rêvent du compositeur qui leur apportera la funambulesque et bastringoforme partition d'un opéra comique avec accompagnement d'ocarinas, grelots, accordéons, xylophones, chapeau chinois et mirlitons, et ils jubilent de penser la gueule que ferait Messager en conduisant l'orchestre.
               En attendant cet heureux jour, ils rendent les plus fervents services à la musique française en affichant, douze fois par semaine, la Tosca, Madame Butterfly, la Vie de bohème, Cavalleria Rusticana et autres spaghetti mélodiques à la mode de Napoli de Milano. Au demeurant, les meilleurs frères du monde plus inséparables que les Siamois légendaires.
               Les Isola n'ont jamais pu s'isoler.